Bière de saint Nicolas d’Alban Gaillard (vers 1930)
Il s’agit de l’œuvre la plus connue de cet imagier et illustrateur lorrain qui a longtemps travaillé pour les Imageries Réunies de Jarville-Nancy, cessant leurs activités en 1947 pour devenir la Société des Papiers Peints de Nancy (54). Il faut dire qu’en termes de publicité brassicole, cette affiche d’Alban Gaillard (1874-1949) commanditée par les Grandes Brasseries de Saint-Nicolas-de-Port (54) ne risquait pas de passer inaperçue ! Nous sommes en pays lorrain.
Or saint Nicolas, évêque de Myre, n’est pas seulement le patron protecteur des enfants depuis qu’il est censé en avoir ressuscité trois, partis glaner aux champs avant d’être tués, découpés et mis au saloir par un vilain boucher… il est aussi celui de la Lorraine. Fêté tous les 6 décembre, saint Nicolas donne donc lieu depuis le XIe siècle à de belles réjouissances familiales dans l’est de la France et dans le Nord, ainsi que dans quelques autres pays d’Europe. Autant dire que sur une affiche de 119 x 79,5 cm destinée à être collée sur tous les murs de la région, l’emblème est de taille à marquer les esprits… Le don d’un collectionneur permet d’en admirer notamment un bel exemplaire entoilé au musée de la Bière de Stenay (55). Si l’existence d’une brasserie locale à Saint-Nicolas-de-Port (54) remonte à 1786, plusieurs rachats et agrandissements ont abouti à l’installation des grandes brasseries en 1931, et jusqu’à ce qu’elles ferment en 1986, dans un superbe bâtiment moderne, témoin de l’architecture industrielle Art déco aujourd’hui devenu musée de la Brasserie. On peut donc imaginer que l’affiche réalisée par Alban Gaillard servait sans doute de support à une grande campagne de publicité lancée autour de cette extension. D’un point de vue graphique formel, on remarque d’ailleurs que l’imagier encadre de pierres murales la scène dans laquelle il fait rejouer la légende de saint Nicolas. Il s’arrange aussi pour y glisser les symboles classiques de la fabrication brassicole que sont l’orge et les cônes de houblon. Derrière le gros fût de bière contenant « la meilleure d’entre toutes », bien visible à la droite de saint Nicolas, fume la cheminée de la brasserie en pleine activité. Pas très loin de la basilique de Saint-Nicolas-de-Port, étonnamment imposante. C’est que cette basilique a été construite pour abriter un petit os… qui ne serait rien moins qu’une phalange de la main droite du fameux évêque de Myre, volée en Italie par un chevalier lorrain ! Autrement dit, une relique. En forme de petit morceau des doigts qui, selon la légende, auraient servi à ressusciter les trois petits enfants… Sauf qu’ici, ce ne sont pas ses seuls doigts que saint Nicolas lève au-dessus des petites têtes jaillissant du baquet de bois, mais bien une généreuse chope de bière. Dont la mousse semble finalement tout aussi revigorante !
4 décembre 2020, articles de presse rassemblés et relayés par Patrice LEVANNIER
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