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Bière et machine learning

Dernière mise à jour : 1 nov. 2020

Quand le machine learning invente une bière IPA et crée du houblon artificiel

Une première bière IPA basée sur une recette élaborée à l'aide d’une IA a vu le jour du côté de Lucerne. Alors qu’aux Etats-Unis, des chercheurs exploitent le machine learning pour créer un goût de houblon artificiel en faisant appel à des techniques de biologie de synthèse.

Blonde, blanche ou ambrée, plus ou moins houblonnée... les bières dans toute leur diversité sont à la mode au pays du chocolat. En quelques années, le marché helvétique de cette boisson ancestrale s’est complètement transformé avec la multiplication des brasseries artisanales. En 2000, la Suisse ne dénombrait que 81 brasseries, selon les chiffres officiels publiés par la Confédération. En 2015, on en répertoriait 623. Ce nombre a aujourd’hui dépassé le millier (1’132 en 2019). A noter que ces chiffres ne prennent pas en compte les producteurs qui ne brassent pas plus de 400 litres par année.

Compte tenu de l'abondance de l'offre de bières en Suisse, comment sortir du lot? Pour MN Brew, la réponse tient en deux mots: intelligence artificielle. Cette micro-brasserie lucernoise a collaboré avec l’éditeur de logiciel Jaywalker Digital et des chercheurs de la Haute école spécialisée de Lucerne pour mettre au point une bière de style IPA (Indian Pale Ale) basée sur une recette proposée par l’outil «Brauer AI», qui carbure au machine learning. Pour élaborer leur modèle algorithmique, les chercheurs sont partis de 157'663 recettes. Ces données ont subi un important nettoyage. Pour réduire la complexité, les recettes avec des ingrédients rares ont été mises de côté, de même que celles trop longues à réaliser et celles qui n'inspiraient tout simplement pas la brasserie partenaire.


Reconnaissance des patterns dans les recettes de bière

67'345 recettes ont finalement été utilisées pour entraîner Brauer AI, qui a appris les multiples façons de combiner au mieux 15 variétés de malt et 1'648 variétés de houblon. «Après quelques heures, l'IA a commencé à reconnaître des patterns qui se répétaient dans les recettes de bière. En internalisant toutes les recettes, le programme a pu générer de nouvelles recettes presque prêtes à l'emploi», explique Marc Bravin, assistant de recherche à la Haute école spécialisée de Lucerne. Pour que Brauer AI puisse générer une recette, il lui faut partir d’un style (IPA, blanche, ambrée, etc.) soit indiqué par le brasseur, soit choisi au hasard par l’IA. Cette dernière propose ensuite une liste de malts et leur proportion dans le brassin. Suivent ensuite des suggestions de variétés de houblon adaptées et les temps de cuisson. La pertinence de chaque recette est vérifiée par un brasseur humain, qui procèdera à des ajustements si nécessaire. Les partenaires du projet tiennent ainsi à souligner que leur outil ne consiste pas à exclure l’humain du processus de brassage mais de le faire collaborer avec l’IA pour trouver des recettes réellement uniques.

IA et biologie de synthèse pour se passer de houblon

Faire appel à l’intelligence artificielle pour élaborer de la bière n’est toutefois pas une exclusivité helvétique. Aux Etats-Unis, des chercheurs en biologie de synthèse vont encore plus loin en faisant appel à l’IA pour savoir comment modifier des molécules au niveau de l’ADN, dans le but, par exemple, de produire des bières IPA très houblonnées... mais sans houblon. L’équipe de scientifiques du Lawrence Berkeley National Laboratory a mis au point l’outil Automated Recommendation Tool (ART), qui puise dans le machine learning et des techniques de modélisation probabiliste pour prédire rapidement les résultats d’un changement dans un gène ou dans une protéine, sans qu'il soit nécessaire de comprendre entièrement les intrications complexes du système biologique des molécules concernées.

Dans le cas de la IPA sans houblon, les chercheurs ont mis à profit leur outil pour savoir de quelle manière modifier la levure productrice d'éthanol utilisée pour brasser la bière afin de synthétiser des métabolites, le linalol et le géraniol, qui donnent le goût du houblon. ART a su guider les scientifiques pour atteindre un niveau particulier de linalol et de géraniol de manière à correspondre au goût de bières connues. Selon les chercheurs, leur technique est économiquement avantageuse car la culture du houblon est intensive en eau et en énergie, et son goût est très variable d'une culture à l'autre. Reste à voir si les amateurs sont prêts à déguster des bières génétiquement modifiées…

Générer des saveurs de bières inédites n’est qu’un exemple parmi d’autres d'applications de l’intelligence artificielle dans le domaine gustatif. Il y a peu, l’entreprise genevoise Firmenich a par exemple élaboré un arôme de bœuf grillé en s’appuyant sur une IA.

Articles de presse rassemblés et relayés par Patrice LEVANNIER

16/10/2020


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